“Il y avait à Capri, en la partie la plus sauvage, la plus solitaire, la plus dramatique, en cette partie entièrement tournée vers le midi et l’orient, où l’île, d’humaine, devient féroce. (...) Nul lieu, en Italie, n’offre une telle ampleur d’horizon, une telle profondeur de sentiment. C’est un lieu, certes, propre seulement aux êtres forts, aux libres esprits.” écrivait Malaparte au sujet de sa villa au nom éponyme.
Son propre portrait en pierre
C’est ainsi qu’il exprimera sa demande en 1937 à l’architecte Adalberto Libera : “Une maison comme moi” avec un goût prononcé pour la provocation. On dit que l’architecte ne lui servit qu’à obtenir un permis de construire, qu’il refusa même ses dessins, le congédia et construisit cette “maison-portrait” lui-même, avec l’aide d’un maçon local, Adolfo Amitrano.
Une architecture rationaliste
De ce goût de la provocation, découle une résidence radicalement moderne et audacieuse de par sa forme. Accessible uniquement en bateau ou après une très longue marche, la villa est offerte aux vents et aux vagues. Perché sur son rocher, cet immense parallélépipède rouge de 54 mètres de long et 10 mètres de large ne peut qu’impressionner.
L’escalier en trapèze qui amène sur le toit-terrasse, dont Jean-Luc Godard sublimera la force esthétique dans Le Mépris, s'inspire d’une église de Lipari, une île italienne où Curzon Malaparte, ancien fasciste, devenu anti-Mussolini, a été confiné en 1934.
Cette demeure insolite arbore un intérieur dépouillé, avec un grand salon de 120 m², que l’écrivain s’amusait à appeler son «immense atrium».
Du mobilier design hors-norme
Véritable provocateur, l’écrivain remplit la villa d’un mobilier imposant, dépareillé. Volumineux, de nombreux meubles n’ont jamais quitté ses murs. Pour profiter de la vue incroyable sur les falaises, de grandes fenêtres ont été installées – créant ainsi de véritables œuvres d’art.
En 2020, l’un des jeunes descendants de Malaparte et actuel propriétaire de la villa, Tommaso Rositani Suckert, réédite avec la galerie Gagosian à Londres, trois des meubles emblématiques qui se trouvaient à l’origine dans le salon : un banc, une table et une console. Chaque pièce a été fabriquée en Italie : une dalle en noyer massif et des colonnes sculptées en pin pour la table, des pieds en marbre de Carrare pour le banc, un piètement en tuf volcanique pour la console, respectant l’essence et l’esprit de Malaparte.